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07.02.22

PAROLE D’EXPERT :

Daniel Guertin sur la rencontre des générations

Chaque année, des milliers de développeur·ses sortent de l’école, diplôme en poche. Ces jeunes talents trouvent un emploi et sont jumelés à des vétérans chevronnés qui ont bâti leur carrière en utilisant des méthodes et des processus de création fort différents. La rencontre de ces générations de développeur·ses peut donner des résultats étonnants, mais elle comporte aussi son lot de défis. En tant que directeur de création, chef d’équipe et mentor auprès des finissants de l’école du jeu vidéo Isart Digital, j’ai remarqué certains défis lorsqu’il est question de jeter des ponts entre les générations.

Choc des cultures du jeu

Pour réunir une équipe multigénérationnelle de créateur·trices, il faut comprendre les différences entre les cultures du jeu vidéo. Partager une expérience enrichissante liée à un jeu qu’on aime est un bon moyen de créer des liens avec d’autres développeur·ses. Mais qu’en est-il si un jeu est sorti bien avant que certains concepteur·trices ne viennent au monde ? Ou lorsqu’un·e jeune concepteur·trice tente d’expliquer la vision d’une fonctionnalité en faisant référence à un titre underground très pointu?  Ce choc des cultures pose, pour plusieurs, un réel défi. Lorsqu’elles collaborent ensemble, les deux générations doivent faire plus que simplement évoquer un jeu quelconque pour faire passer leur message. Elles doivent parvenir à définir l’essence même du jeu, plutôt que de s’appuyer sur les référents culturels de l’autre. Cela veut dire expliquer la psychologie qui se cache derrière la structure d’un jeu, plutôt que d’évoquer un niveau de jeu spécifique. Un autre exemple consiste à exposer les nombreux choix complexes qu’une règle de jeu représente pour un joueur·se, plutôt que de dire qu’une arme est vraiment géniale. Bien que cela demande plus de temps et d’efforts, cela permet aux concepteur·trices de mieux comprendre en quoi le jeu se démarque.

Choc des méthodologies

Aujourd’hui, les concepteur·trices de jeux en herbe peuvent s’inscrire dans des écoles de qualité axées sur l’enseignement du développement de jeux, mais ce n’était pas le cas pour de nombreux vétérans du secteur. L’un des plus grands défis à relever pour réunir différentes générations de concepteur·trices au sein d’une même équipe est de gérer leurs méthodologies de création. Pour apprendre à créer de bons jeux, les concepteur·trices chevronné·es se sont fié·es à l’excitation et à l’émerveillement qu’ils·elles ont ressenti·es en jouant à des jeux classiques. Quant à elle, les concepteur·trices de la jeune génération ont été formés à divers styles et techniques de développement au cours de ses études et entament leur carrière avec un bagage de connaissances très différent. Souvent, les jeunes concepteur·trices ont l’impression que les vétérans ne comprennent pas ce qu’ils·elles font, tandis que les vétérans pensent que les plus jeunes ne parviennent pas à recréer les « effets wow » qui ont fait des jeux vidéo des phénomènes de divertissement. Si le fait d’apaiser leur frustration et de tirer le meilleur des deux générations peut poser certains défis, cette approche peut mener à résultats surprenants. Après tout, si un concepteur·trice expérimenté·e arrive à montrer à un·e jeune issu·e d’un monde de jeux en 3D hyperréalistes à recréer la sensation qu’on éprouve en voyant un machin jaune bouffer des points sur un écran, vous parviendrez à créer une équipe capable de grandes choses.

Uni·es par l’amour des jeux vidéo

Réunir des générations de développeur·ses peut poser bien des défis, mais c’est possible. Quels que soient leur culture du jeu, leurs études, leurs antécédents ou leur âge, ils·elles sont tou·tes lié·es par leur amour des jeux vidéo. Les amener à parler de jeux, de ce qui les rend extraordinaires, et de ce qui les a motivés à choisir cette carrière, demeure à ce jour, le meilleur moyen de rapprocher les générations.

Daniel Guertin
Directeur créatif